De Clovis à Briand : un grand récit de la laïcité

bringuier_recit Laïcité

Georges Bringuier

Un grand récit de la Laïcité

Paris, ed. L’Harmattan, 2019, 326 p.

Georges Bringuier, scientifique, inspecteur honoraire de l’Education nationale, devient un spécialiste contemporain de la question laïque. Ses nombreuses conférences sur ce thème, ses livres successifs en témoignent : « Lucy, Eve et Marianne » en 2010, « La Laïcité dans tous ses Etats » en 2016 ; « Le flamboyant destin du chevalier de la Barre » en 2017. Sans oublier deux bibliographies dont l’une sur « Charles Darwin, Voyageur de la raison » en 2012. Ces productions montrent une continuité pour effectuer des recherches passées et actuelles sur cette vertu, la Laïcité, qui complète notre pacte républicain Liberté Égalité Fraternité ! Lire la suite « De Clovis à Briand : un grand récit de la laïcité »

De Clovis à Briand : un grand récit de la laïcité

Le chevalier de La Barre

couv_ChevalBarre2

Le flamboyant destin du chevalier de La Barre

Georges Bringuier

Toulouse, Editions Privat, mai 2017

216 pages.

Georges Bringuier est un auteur prolifique.

Avec cette dernière livraison, l’auteur montre, une nouvelle fois, sa volonté de promouvoir  la richesse de personnalités hors normes : Darwin, Grotendhiek et, en même temps, construire un plaidoyer pour la liberté de conscience, la laïcité : Eve Lucy et Marianne ; La laïcité dans tous ses états

Cet ouvrage dense, « le flamboyant destin du Chevalier de la Barre », est bien plus qu’une biographie. C’est « une mine » pour tout curieux qui se respecte.

Georges Bringuier nous propose des approches multiples de nature  historique, théâtrale, sociologique, philosophique… Nous sommes en présence d’un travail de bénédictin ou plus exactement d’un « moine laïque ». L’auteur respecte la méthode scientifique, démonstrative qui lui est chère. De plus il rassemble des données inédites savamment répertoriées dans les annexes et les notes de pieds de pages. Au détour d’une page quelle ne fut pas ma surprise de découvrir le « petit prince du rugby », Didier Cordoniou. En sa qualité de maire de Gruissan il a réhabilité une statue du Chevalier de la Barre dans sa commune. On apprend que ce village audois, dans les années 1930, fut un haut lieu de « la libre pensée ». Dès cette époque, sous l’impulsion d’un mécène de cette ville, un buste du Chevalier de la Barre a été érigé. Au-delà de l’anecdote on pressent que Georges Bringuier a visité Abbeville et sa région, Paris et tous les lieux susceptibles de compléter, par de nouvelles sources originales, ses recherches sur Le Chevalier de La Barre !

Sans doute pour faciliter la compréhension de cette épopée, Georges Bringuier présente les protagonistes de l’affaire : les accusés, les juges d’Abbeville, les juges de Paris, les partisans du Chevalier, ceux qui ont changé de parti…Le décor est planté pour une pièce de théâtre à venir avec des personnages surprenants : de Louis Pierre Broutelle, marchand de vin et de cochon, flatté d’être devenu juge assesseur en dernier recours… à l’évêque d’Amiens, Monseigneur de La Motte. En 1765, alors que l’affaire qui met en cause le Chevalier de La Barre secoue la ville d’Abbeville , l’évêque mène, pieds nus, la cérémonie de pénitence pour « réparer » l’offense faite à la statue du Christ, en présence de tous les dignitaires de la région. Tardivement, «après réflexions », cet évêque intervient auprès de Louis XV pour qu’il accorde sa grâce au Chevalier au vu de la minceur du dossier d’instruction ! Selon lui, la condamnation à mort avait été rendue en toute illégalité. Le roi Louis XV, refusa d’user de son droit de grâce. Georges Bringuier ajoute que, par le passé, des tentatives de réalisations de pièces théâtrales, voire de comédie musicale… ont eu lieu, sans succès.

Georges Bringuier s’applique dans de nombreuses pages à resituer l’environnement sociologique de l’époque, dans les années prérévolutionnaires des années 1760. Chemin faisant, nous disposons de belles pages d’analyse du fonctionnement de la justice de l’époque. On entrait « en » justice de père en fils. De même pour les bourreaux, par exemple dans la famille Sanson le père a exécuté le Chevalier de La Barre et le fils fut l’auteur de l’exécution de Louis XIV !

A cette époque il est clair que «  les délits de blasphème et d’impiété sont des crimes qui relèvent de la justice du roi et non de la justice de l’église. Le blasphème touche la source de la souveraineté définie par la doctrine du droit divin. La monarchie et l’église trouvent l’une dans l’autre leur légitimation »

L’affaire au centre de ce procès inique est la profanation du crucifix situé sur le pont neuf d’Abbeville… « la population, autant par dévotion que par superstition se masse et se lamente devant le crucifix mutilé : ça n’est pas un bout de bois tailladé : c’est le christ en personne qui est à nouveau supplicié ». Georges Bringuier montre l’incroyable montée en puissance d’un fait mineur effectué par des jeunes en goguette…qui va conduire à une condamnation sans appel du Chevalier de la Barre.

Des descriptions difficiles à supporter sur les supplices endurés par ce flamboyant Chevalier qui restera toujours la tête haute avant qu’on lui la coupe avec un sabre ! «  la tête et le corps sont placés sur le bûcher avec le Dictionnaire philosophique, qui a été auparavant lacéré : le tout recouvert de paille. On met le feu aux quatre coins. Il est 6 heures et demie du soir : le supplice de Jean-François de la Barre a commencé à 5 heures du matin. » En effectuant l’autodafé de livres suspects, les « anti lumières couronnent leurs méfaits.

De suite, la revanche posthume du Chevalier de la Barre est en route : « Mécréant, incrédule, il veut penser librement ; il est réfractaire aux dogmes indiscutables, aux pensées imposées par l’église. Sa vie, son procès, son jugement, son supplice et son exécution vont faire de lui le symbole de la liberté de conscience et par extension de la Laïcité. ». En 1941 les vichystes ne s’y tromperont pas en faisant déboulonner et fondre la statue qui fut érigée à Montmartre. en 1905, et transférée en 1926 square Nadal à Paris.

Le travail conséquent effectué par Georges Bringuier est utile et nécessaire tout un chacun notamment pour continuer à lutter contre les fanatismes. « Le fanatisme est à la superstition ce que le transport est à la fièvre, ce que la rage est à la colère. Celui qui a des extases, des visions, qui prend des songes pour des réalités, et ses imaginations pour des prophéties, est un fanatique novice qui donne de grandes espérances ; il pourra bientôt tuer pour l’amour de Dieu » Le Chevalier de la Barre avait lu ce texte de Voltaire dans son Dictionnaire philosophique. Ces fanatiques de l’« amour de Dieu » l’ont supplicié et brûlé avec ce dictionnaire aux propos toujours d’actualité !

En conclusion nous ne pouvons qu’être d’accord avec l’auteur qui dédie ce livre à son fils Gabriel mais aussi « à tous les jeunes dignes héritières, héritiers du « petit chevalier » qui portent l’espoir d’un avenir meilleur : plus libre, plus juste, plus fraternel. »

Le chevalier de La Barre

Charles Darwin, Voyageur de la Raison

couvDarwin

Charles Darwin, Voyageur de la Raison

Georges Bringuier

Toulouse, éditions Privat, mai 2012, 252p.

Lors d’un « café Philo » à Tarbes sur le thème du Vivant, la place et le rôle de Darwin dans le champ des idées, fut évoqué. La théorie de l’évolution, a été mise à mal par les tenants de thèses liées à un « dessein intelligent », un créateur divin… Sigmund Freud (1856-1939) avait tranché: « la théorie de l’évolution a détruit l’argument du dessein, de l’intention (divine), selon lequel la beauté du monde et la perfection des organismes vivants démontrent l’existence d’un créateur ». Dans un autre ordre d’idées, lors de cette même soirée, une participante m’indiqua, qu’avec son mari, ils préparaient un voyage en Australie pour visiter le musée Darwin.

Suite à ces nouvelles interrogations, je me suis « replongé », plus sérieusement, dans l’ouvrage de Georges Bringuier. Dans un premier temps, j’ai découvert que La ville de Darwin au nord de l’Australie avait été crée en 1839, par une équipe de marins et de scientifique anglais dont certains avaient vécu aux côtés de Charles Darwin, lors du voyage du Beagle. Ce port naturel est devenu une ville très attractive avec un musée des Arts Premiers remarquable. Darwin avait 30 ans  lorsque le nom de cette ville lui fut attribué ! Au-delà de cet aspect anecdotique de la vie et de l’œuvre de Charles Darwin, la lecture du livre de Georges Bringuier s’impose pour faire face à nombreuses contre-vérités développées de nos jours, notamment par des créationnistes, sur le darwinisme…

Charles Darwin est né dans une famille aisée, cultivée en 1909. L’Angleterre commençait à rayonner dans le monde. L’essor de l’empire britannique trouvera son apogée avec le couronnement de la reine Victoria (1819-1901) en 1837.

Dans une première partie introductive à cet important travail, l’auteur présente le jeune insouciant Charles Darwin comme un jeune homme peu recommandable… «  du véritable vaurien à l’étudiant dilettante… »

Et pourtant, à 22 ans, par un concours de circonstances heureuses, bien que de santé fragile, Charles Darwin va embarquer sur le Beagle, un modeste trois mâts, comme géologue, pour une mission scientifique autour du monde. Ce périple va durer 5 ans : les 2/3 du temps sur terre, 1/3 sur mer… Pendant plus de 100 pages passionnantes, George Bringuier nous fait partager cette aventure humaine dans des contrées reculées, sauvages, peu explorées en cette première moitié du 19 ème siècle. Un premier récit qui nous fait découvrir des paysages variées, des civilisations archaïques en devenir. Georges Bringuier utilise une forme romancée pour suivre la vie et les découvertes de ces marins et scientifiques accompagnés par des personnages autochtones hauts en couleur. Une recherche systématique de faune et de flore à peine connues. Chemin faisant ces « aventuriers » découvrent une vraie misère et des modes de vie inacceptables (esclavage, travail à la mine, brutalités envers les femmes et les enfants, anthropophagie…)

Les colonies anglaises sont omniprésentes sur ce parcours. A chaque escale, Charles Darwin envoie les recueils de données, les collections animales végétales recueillis au fil de ses déplacements. Ces données scientifiques sont stockées à Londres. Dès cette époque des travaux sont publiés par des institutions savantes. Dans cette aventure Charles Darwin bénéficie des apprentissages acquis lors de sa jeunesse : bon cavalier, bon chasseur. De même ses aptitudes à vivre avec des jeunes socialement différents lui facilite ses multiples rencontres. Il est clair que la fortune familiale et l’entre gens de sa famille, honorablement connu, y compris dans le monde scientifique, lui facilite les démarches. En lisant le « voyage du Beagle » on comprend aisément que « le jeune homme enthousiaste et novice s’est mué en scientifique expérimenté et sur de lui ».

La seconde partie de ce récit proposée par Georges Bringuier est tout aussi attractive. Nous suivons le travail de Charles Darwin qui va, pendant plus de trente ans, analysait les travaux recueillis pendant son voyage, les confrontaient à tous les savants géologues, naturalistes et autres… pour forger sa théorie sur « l’origine des espèces ». Neuf années d’études approfondies sur les cirripèdes (groupe d’animaux exclusivement marins de l’ordre des crustacés) plus ; 20 ans seront nécessaire pour forger sa théorie de l’Evolution. Charles Darwin procède de façon méthodique, avec fermeté, une grande curiosité au sujet des faits et un certain amour du nouveau et du merveilleux. Dans son autobiographie il regrette ses insuffisances sur la connaissance les langues, le français en particulier, et en mathématiques… Plus surprenant il s’avoue autodidacte ! Il concède : « J’ai travaillé aussi bien et aussi dur que j’ai pu ; nul homme ne peut faire davantage ». De plus Charles Darwin s’est toujours souciés des avis de ses contempteurs comme de ses détracteurs…

Au fil des pages le lecteur découvre le fourmillement de savants qui évoluent avec lui, contre lui… Une épopée pour cet humaniste replié sur ses terres car très malade tout au long de sa vie, très respectueux de son épouse croyante, soucieux de l’éducation et du devenir de ses enfants…

Dans cet ouvrage Georges Bringuier fait preuve d’érudition et d’une formidable aptitude pédagogique pour nous apprendre à connaître et aimer Charles Darwin. La bibliographie est concentrée sur les ouvrages essentiels écrits par Darwin lui-même. Une carte simple nous permet de suivre aisément le périple du Beagle. Comme d’habitude les notes proposées en fin de chapitres sont instructives en elles-mêmes. Un index des noms de personnes complètent cette présentation et incitent, de mon point de vue, le lecteur à revenir de temps à autres, sur des points essentiels contenus dans cet ouvrage.

Il est clair que la théorie de l’évolution est incompatible avec les dogmes religieux même si récemment le pape Jean-Paul II a reconnu que « l’évolution est plus qu’une hypothèse ». La montée en puissance de « l’intelligent design » le dessein intelligent, prôné par des évangélistes américain qui insistent pour estimer que la complexité de la vie ne peut être due qu’à l’intervention d’une intelligence supérieure, divine. » ; Où du turc, Harun Yaha (Atlas de la création), pour qui « une volonté supérieure régit toutes créatures » sont des thèses insoutenables car toutes les recherches récentes, ADN en particulier, confortent le darwinisme ! A ce propos on peut écouter avec bonheur les émissions radios de Jean-Claude Ameisen à France-Inter « Sur les épaules de Darwin » Des contenus d’émissions variées qui précisent la pertinence actuelle du Darwinisme. Rappelons les propos de Thomas Huxley (1825-1895) biologiste, paléontologue et philosophe s’adressant à un éminent archevêque qui contestait la théorie de l’évolution : Thomas Huxley répliqua avec humour qu’il « préférerait descendre d’un singe plutôt que d’un homme instruit qui utilisait sa culture et son éloquence au service du préjugé et du mensonge »

En conclusion ce livre dense nous renvoie à une période historique extraordinaire. En cette fin du XVIIIème siècle et cette première partie du XIXème siècle, la pensée française est rayonnante (siècle des lumières), mais aux dires de Montesquieu (1685-1755) c’est l’Angleterre qui fascine par son dynamisme et sa modernité dans le champ scientifique. On découvre également les « disputes » sur la paternité de théories scientifiques, par exemple entre le français Lamarque (1744-1829) considéré, lui aussi, comme l’inventeur de l’idée d’évolution avec l’anglais Erasmus Darwin (1707-1798) le grand père de Charles. Enfin on a pu penser que l’acceptation de la thèse de Charles Darwin en 1859 et ses répercussions scientifiques réelles et indiscutées à ce jour, avait mis fin au débat entre le fixisme (créationnisme), de Cuvier (1769-1832) (vérité inscrite dans la Bible et/ou une évolution programmée par une transcendance) et le transformisme (transmutation des espèces) de Lamarque…

La lecture de « Charles Darwin, voyageur de la raison » s’impose encore aujourd’hui. Comme nous le propose Georges Bringuier, comme Charles Darwin, nous souhaitons être « un honnête homme » !

Charles Darwin, Voyageur de la Raison

Le 9 décembre à Tarbes : Citoyenneté, Laïcité, Démocratie

La journée nationale de la laïcité est l’occasion de se pencher sur les enjeux de la laïcité chaque année.

A Tarbes, les services de l’Education nationale organisent, à la Halle Marcadieu, une matinée ouverte aux élèves autour des 15 articles de la Charte de la laïcité à l’école.

A 20 heures, ce sont des membres de la réserve citoyenne ( et co-auteurs de ce blog) qui proposent, en partenariat avec la Scène nationale Le Parvis, une rencontre débat.

laicitédanstoussesetats

Georges Bringuier, auteur entre autres de La Laïcité dans tous ses états, ouvrira la soirée par une intervention sur ce thème.

image_filmdemocratie

La projection du film  Démocratie année zéro de Christophe Cotteret précédera un débat autour de la citoyenneté et de la démocratie.

–> Pour en savoir plus  sur la soirée : 9dec2016_tarbes_laicite

–> Pratique :

Scène nationale Le Parvis

Centre Commercial Le Méridien, Route de Pau, 65420 Ibos
Téléphone : 05 62 90 08 55

entrée libre 4€

Le 9 décembre à Tarbes : Citoyenneté, Laïcité, Démocratie

La Laïcité dans tous ses états

laicitedanstoussesetats« La Laïcité dans tous ses états »

2016 – Georges Bringuier – Inspecteur de l’Education Nationale – Toulouse

Georges Bringuier fait partie de ces scientifiques soucieux de s’inscrire dans des approches favorisant l’acquisition des connaissances par tous, tout au long de la vie. Scientifique dans le champ des « sciences dites dures (mathématiques et physiques) », il reste très présent dans le champ des sciences sociales et humaines (voir bibliographie ci-après)

« Les efforts de recherche, de compréhension bien souvent, m’ont conduit à une formalisation qui peut être utile à ceux qui comme moi n’ont pas forcément toutes les clés, toutes les connaissances scientifiques, historiques, philosophiques… Je me présente comme quelqu’un qui apprend plutôt que comme quelqu’un qui sait…)  ». Naturellement je partage totalement ces propos de Georges…

Lire la suite « La Laïcité dans tous ses états »

La Laïcité dans tous ses états